Des voix d’enfants générées par ordinateur trompent leurs propres parents. Des masques fabriqués à partir de l’intelligence artificielles et de photos sur les réseaux sociaux parviennent à duper les systèmes de reconnaissance faciale.
Ces méthodes, dignes d’un film de science-fiction, sont déjà entre les mains de criminels ciblant le grand public.
L’essor de ces technologies d’escroquerie a alerté les régulateurs, les forces de l’ordre et les hauts responsables de l’industrie financière. L’intelligence artificielle (IA) renforce considérablement la fraude, a averti Lina Khan, présidente de la Commission fédérale du commerce des États-Unis, insistant sur la nécessité d’une vigilance accrue des autorités.
Avant même que l’IA ne se démocratise, le monde peinait à maîtriser une augmentation massive de la fraude financière.
Aux États-Unis, les consommateurs ont perdu près de 8,8 milliards de dollars en une année, une augmentation de 44% par rapport à 2021, malgré un investissement record dans la détection et la prévention. Des experts en crimes financiers de grandes banques, tels que Wells Fargo et Deutsche Bank, considèrent l’augmentation imminente de la fraude comme une menace majeure pour le secteur.
Au-delà des coûts liés à la lutte contre ces escroqueries, l’industrie financière risque de perdre la confiance de ses clients. James Roberts, responsable de la gestion de la fraude à la Commonwealth Bank of Australia, décrit la situation comme une « course aux armements », admettant qu’il est difficile de dire si le secteur bancaire est en avance.
Les arnaques existent depuis la naissance du commerce. Des tentatives historiques, remontant à plus de 2000 ans, visaient déjà à tromper pour s’enrichir. Mais l’innovation technologique bouleverse périodiquement l’économie de la fraude.
Les emails ont exposé tout un chacun à des escrocs aux histoires rocambolesques, tandis que la cryptomonnaie a vu émerger de nombreux schémas pyramidaux se propageant sur les réseaux sociaux.
L’avenir de la falsification
Les cybercriminels ont trouvé en l’intelligence artificielle (IA) un allié pour parfaire leurs escroqueries. Bien que les objectifs restent les mêmes – vous inciter à cliquer sur des liens malveillants ou à télécharger des logiciels espions – l’IA ajoute une couche de sophistication à ces attaques, rendant le piège encore plus convaincant.
Un danger croissant réside dans la capacité des escrocs à utiliser l’IA pour imiter la voix d’un proche, afin de convaincre une victime de leur envoyer de l’argent ou de leur donner accès à des comptes sensibles. De plus, en exploitant les informations publiques disponibles sur les réseaux sociaux, certains pirates peuvent programmer des chatbots pour envoyer des messages sur mesure, prétendant être quelqu’un d’autre. Dans des cas extrêmes, ces techniques peuvent même mener à des menaces d’enlèvement.
L’IA permet également de générer du contenu factice, comme de faux articles politiques ou des publications sur les réseaux sociaux, pour manipuler ou menacer les utilisateurs. Certains sont même allés jusqu’à créer de fausses offres d’emploi rédigées par l’IA.
Malheureusement, la technologie est devenue tellement avancée qu’elle peut facilement tromper la vigilance. De plus, aucune loi actuelle ne punit ou ne prévient la création et la diffusion de fausses informations générées par l’IA.

Les dirigeants bancaires soulignent que les escrocs préparent parfois leurs attaques pendant des mois. Ce que nous observons actuellement n’est que la pointe de l’iceberg, estime Rob Pope, directeur de l’agence de cybersécurité du gouvernement néo-zélandais.
Face à cette menace, les banques réagissent en éduquant leurs clients sur les risques et en investissant davantage dans les technologies de défense. Des logiciels innovants peuvent par exemple détecter des mouvements de souris inhabituels lors d’une transaction, signalant une possible arnaque.
Comment se prémunir contre les arnaques ?
La protection contre ces nouvelles menaces repose principalement sur la vigilance du public. Même si l’IA peut être convaincante, il est possible de déceler des anomalies dans les images ou vidéos générées. Par exemple, des proportions corporelles incorrectes, des mouvements saccadés ou des défauts visuels.
De plus, une recherche inversée d’image peut vous aider à identifier si une image a déjà été utilisée ou provient d’un générateur d’IA. Par ailleurs, adopter des mesures basiques de sécurité en ligne reste crucial :
- Méfiez-vous des appels provenant de numéros inconnus.
- Soyez prudent avec les liens suspects.
- Vérifiez toujours la légitimité d’un message.
- Évitez de vous connecter via vos comptes sociaux sur des sites douteux.
- Ne divulguez jamais vos données personnelles.
- Utilisez des mots de passe uniques pour chaque compte.
- Signalez toute activité suspecte.
L’IA : entre véritables avancées et fausses promesses
Tandis que l’escroquerie par IA inquiète, un autre type de tromperie émerge : la surestimation de l’IA. Avec la montée en puissance de cette technologie, de nombreuses entreprises prétendent offrir des produits « alimentés par l’IA », à l’instar de ce que l’on a vu avec les cryptomonnaies ou les NFTs.
Il est essentiel de comprendre les capacités réelles de l’IA. Le terme « intelligence artificielle » peut induire en erreur, suggérant une forme de pensée autonome, ce qui n’est pas le cas.
De nombreux escrocs, jouant sur cette méconnaissance, vantent des produits IA miraculeux. Par exemple, certains prétendent que vous pouvez gagner énormément en utilisant leurs outils IA pour écrire, coder ou dessiner. Cependant, s’appuyer sur des contenus générés par l’IA peut s’avérer risqué.
Des outils tels que ChatGPT ou Midjourney reposent sur des contenus créés par de véritables individus, souvent sans leur consentement. Ces programmes, loin d’être parfaits, peuvent produire du contenu inexact ou plagié.
Conclusion
L’avènement de l’intelligence artificielle dans notre quotidien est à la fois une bénédiction et une source potentielle de préoccupations. Si elle offre des possibilités inédites en termes d’innovation et de commodité, elle est également un nouvel outil dans l’arsenal des cybercriminels.
Comme avec toute avancée technologique, la clé réside dans la sensibilisation et l’éducation. Plus nous sommes informés des avantages, des limites et des pièges potentiels de l’IA, mieux nous sommes équipés pour naviguer dans cette nouvelle ère numérique en toute sécurité.